Extrême droite francophone : qui est qui ?

RésistanceS | Observatoire belge de l’extrême droite  | Dimanche 7 octobre 2018 | 22 h 55


DOSSIER SPECIAL ÉLÉCTIONS 2018 (épisode 4/9) – Des listes d'extrême droite belge francophone ont été déposées dans vingt-trois communes wallonnes et deux bruxelloises, ajoutées à vingt-six listes pour les élections Provinciales, et ce au sein de deux « pôles » différents, concurrents et adverses. D'un côté, celui du mouvement Nation et de la Nouvelle Wallonie alternative (NWA), de l'autre celui du « nouveau » parti AGIR, derrière lequel se trouve l'ex-FN « canal historique » rallié par de petites formations locales, ainsi qu’une section dissidente du Parti populaire – RADIOSCOPIE


A l'occasion des scrutins communaux et provinciaux du 14 octobre, deux pôles électoraux se sont constitués au sein de l'extrême droite belge francophone, dans le but d'éviter l'éparpillement du vote protestataire nationaliste, xénophobe et anti-politique. Tout d'abord, il y a celui conduit par le mouvement Nation et la Nouvelle Wallonie alternative (NWA), mis en place il y a plusieurs mois. Puis, celui dyna
misé, il y a juste quelques semaines, par le « nouveau » parti AGIR.

Conduit par le « canal historique » de l'ancien Front national belge, le second pôle s'est renforcé avec l'adhésion de trois petits partis locaux et une section entière du Parti populaire de l'avocat d'affaires bruxellois Mischaël Modrikamen. Radioscopie de ces deux pôles, par ordre alphabétique de ceux qui les composent.



AGIR
Ce « nouveau » parti est celui créé en février 2017 par l'ancien Front national maintenu jusqu'en 2016 par son « canal historique », dont la survie est due à la volonté obsessionnelle de Salvatore Nicotra, un des anciens lieutenants du docteur Daniel Féret, le fondateur-président en 1985 du FN belge(lire l'article du journal RésistanceS : Le Front national belge va continuer d'AGIR). Depuis les élections communales de 2006, Nicotra siège au conseil communal de Fleurus. Dans cette commune des environs de Charleroi, il fut la première fois élu sur une listeestampillée FN, et la seconde fois sur une liste dénommée LEPEN, pour : Ligue Européenne, Patriotique, Egalitaire et Nationaliste. En 1994, ce belgo-italien d'origine bruxelloise avait été propulsé au conseil communal de Saint-Gilles, déjà pour le compte du FN. Nicotra y fit ses classes en politique, en multipliant les provocations – sur l'invasion musulmane, l'influence des francs-maçons ... - laissant encore de nos jours un mauvais souvenir à Charles Picqué, bourgmestre de la commune bruxelloise en question et ancien ministre-président de la Région de Bruxelles-capitale.

Pour la survie de sa boutique électorale, le choix de l'appellation AGIR par Nicotra a été mûrement réfléch
i. Cette « marque », dont le sigle électoral signifie « Action générale d'intérêt régional », fait directement référence à une autre formation électorale d'extrême droite qui se nommait de la même façon. Se présentant comme un « Front wallon », pour se distinguer du Front national, l'AGIR premier du nom est fondé à Liège en 1989, par des scissionnistes du Parti des forces nouvelles (PFN). Son acronyme signifie : Avant-garde d'initiative régionale. Fort, au début des années 1990, de plusieurs sections en Wallonie et d'une à Bruxelles, AGIR deviendra, après le FN, le deuxième parti le plus important de l'histoire de l'extrême droite francophone, avec plusieurs élus communaux et provinciaux (voir l'article du journal RésistanceS : AGIR : le deuxième parti d'extrême droite francophone).

Dans une stratégie « une pierre deux coups »,le nouveau AGIR espère pouvoir réanimer, le 14 octobre prochain, le souvenir de son homonyme auprès de ses anciens électeurs, tout en récupérant l'électorat orphelin du FN belge. Dans la perspective de se réimplanter sur les terres électorales fertiles du frontisme,AGIR a réussi à faire venir vers lui, des militants et des responsables de plusieurs fractions de l'extrême droite wallonne. On y retrouve ainsi des anciens du mouvement Wallonie d'abord ,appellation choisie en 2008 par les dissidents du FN, ayant fondé quatre ans plus tôt le parti Force Nationale (FNationale). Il y a également des anciens de Faire place Nette (FpN), qui avaient déposé une liste électorale dans le Hainaut aux dernières législatives, en 2014, en collaboration avec le Vlaams Belang et le président d'honneur du FN français, Jean-Marie Le Pen. AGIR reçoit aussi le soutien d'anciens membres de la Nouvelle alliance francophone (NAF), localisée dans la commune de Saint-Ghislain. Pour les communales et les provinciales qui auront lieu dans quelques jours, le parti présidé par Salvatore Nicotra a surtout scellé une alliance électorale avec le Parti des pensionnés, le groupe Agir Ensemble, le Parti wallon et une section dissidente quasi complète du Parti populaire (sur les membres de cette alliance : voir ci-dessous la suite de nos notices de présentation).

Décompte de la présence d'AGIR aux élections du 14 octobre : si le « nouveau » parti n'a pas (encore) été capable de déposer des listes dans la Région
bruxelloise, il est présent dans douze communes wallonnes et dix-huit districts provinciaux. Des mouvements d'extrême droite wallonne participant aux prochains scrutins, c'est bien le parti politique AGIR qui a réussi à présenter le plus de candidats. Soit septante-quatre candidats contre quarante-neuf candidats pour le pôle Nation. En cas de victoire le 14 octobre, la formation conduite par le conseiller communal sortant de Fleurus, Salvatore Nicotra, pourra se targuer d'être « la seule alternative, l'unique opposition », à la droite de la droite radicale.


AGIR ENSEMBLE (AE)
Ce groupe communal apparait en 2015 à Dison. Il est conduit par Jacques Lespire, l'un des membres, depuis les élections de 1994, du Conseil communal de cette commune des environs de Liège. Lespire y est élu une première fois, avec 7,7 %, sur la liste du Front national (FN) de Daniel Féret. En cours de mandat, il suit la députée fédérale frontiste Marguerite Bastion qui fonde un nouveau parti concurrent, le Front nouveau de Belgique (FNB). Aux communales de 2000, le FNB n'obtient aucun élu à Dison. Six ans plus tard, Jacques Lespire y conduit la liste de Force nationale (FNationale), fondée par des dissidents du FN et du FNB, et est réélu avec plus de 8 %. En 2012, il est une troisième fois réélu, avec 6 %, sur la liste de Wallonie d'abord, le nouveau nom de FNationale.

Après la disparition de ce mouvement nationaliste wallon, Lespire lance le groupe Agir ensemble (AE). Comme l'ensemble de l'extrême droite, AE est gagné par une obsession phobique : l'islam. En août 2015, on lit sur son mur Facebook : « l'islam n'[est] pas une simple religion mais un système politique d'essence totalitaire ». La donne est simple pour ce groupe politique : les musulmans acceptant de se soumettre et d'effacer toute visibilité de leurs pratiques religieuses dans l’espace public pourront rester en Belgique, les autres devront « gagner un des 57 pays musulmans de la planète où règne la charia ». En cas de refus des mesures anti-islam préconisées par Agir ensemble, ou d'émeutes, celui-ci écrit que l'armée sera « dépêchée à chaque menace » et devra sans hésitation « tirer dans le tas ». Dont acte.

Le mois suivant, Agir ensemble participe à un « colloque sur la souveraineté », organisé à Bruxelles par le Vlaams Belang, avec pour vedette américaine, Marine Le Pen en personne. En octobre 2016, Jacques Lespire se rapproche du Front wallon
 (FW), conduit par Charles Petitjean, un des anciens députés régionaux du Front national. Moins d'un an après, en juillet 2017, le conseiller communal rejoindra avec son groupe Agir ensemble, la Coordination patriotique, déjà composée du Parti des pensionnées, de la N-SA flamande et du mouvement Nation (voir l'épisode 2 de notre dossier élections). Une fois de plus, ce ralliement sera de très courte durée. Juste quelques jours avant le dépôt des listes, à la mi-septembre, Lespire fait alliance avec AGIR. Son transfertest finalement payant : il est propulsé tête de liste de ce « nouveau » parti pour ses listes provinciale et communale à Dison. Jacques Lespire sera-t-il réélu pour une quatrième fois, le 14 octobre prochain ?

NATION
Deux listes
portant le nom de « NWA- Nation » ont été déposée à Charleroi, l'une pour les communales, l'autre pour les provinciales. Ailleurs, ce pôle se présente sur des listes labélisées uniquement du sigle de Nation. Deux sont présentes dans la Région bruxelloise, à Anderlecht et Evere, et douze en Wallonie. Pour les provinciales, ce pôle électoral est présent dans sept districts wallons. Au total, Nation et son seul allié présente en Wallonie quarante-neuf candidats communaux, contre septante-quatre candidats pour AGIR. Une sérieuse différence.

L'alliance électorale entre le mouvement Nation et la NWA (Nouvelle Wallonie alternative) s'est scellée en janvier dernier dans le cadre de la 
Coordination patriotique mise en place en mai 2017. Regroupant alors également le Parti des pensionnés et Agir ensemble, cette coordination n'est plus composée désormais que par Nation et la NWA.

Le mouvement Nation, apparait en septembre 1999, à Bruxelles, sous l'appellation officielle de « Mouvement pour la Nation », après les Etats généraux du nationalisme. Ce « sommet » a réuni, durant l'été précédent, les derniers activistes du groupe néonazi 
L'Assaut, qui étaient passés par le Front nouveau de Belgique, dissidents du Front national « féretiste » et du mouvement néorexiste REF. La ligne idéologique de Nation est celle du « nationalisme-révolutionnaire » (NR). Par la suite, le mouvement se revendiquera du « solidarisme », une variation du courant NR. Il adopte d'abord comme emblème la croix celtique, un vieux symbole de l'extrême droite se revendiquant de l'Occident chrétien.

Pour former ses premiers adhérents, le mouvement Nation lance le Centre de formation nationaliste Jacques Borsu, du nom du dirigeant del'Europese Partij / Parti Européen (EPE), un groupuscule néonazi et négationniste dont fit partie le leader de Nation, Hervé Van Laethem, avant de fonder la section bruxelloise du Vlaamse Militanten Orde (VMO) en 1986, puis le groupe L'Assaut deux ans plus tard. Des militants de Nation sont actifs au sein des « Wallon’s boys », regroupant des supporters ultras carolos de football, pour la plupart skinheads et néonazis.





Mouvement essentiellement axé sur l'activisme de terrain, Nation a également une vocation électorale. En octobre 2006, il tente pour la première fois de se présenter aux élections. Mais mesurant son incapacité d'affronter seul ce challenge, il participe à la constitution d'une « mouvance identitaire » (sic) regroupant l'association national-catholique Belgique & Chrétienté d'Alain Escada, la bannière wallonne de Terre et Peuple (un « mouvement de résistance identitaire européen » dont le fief se trouve en France) et le Front nouveau de Belgique (FNB). Plusieurs activistes de Nation vont figurer sur des listes communales du FNB, toutefois sans aucun succès. C'est un réel échec pour les identitaires de Nation. Trois ans plus tard, nouvelle tentative aux élections régionales. Nation n'a les capacités de ne déposer qu'une seule liste, pour le Parlement de la Région de Bruxelles-capitale. Elle ne rassemblera que 0,12 % des suffrages bruxellois. C'est une humiliation. Le mouvement va reconnaitre officiellement, sur son site Internet, que ses « résultats [sont] très décevants », sans toutefois préciser son score. Conséquence directe en interne : sa direction est remise en cause, et remplacée, lors de son congrès, en décembre 2009.

Trois ans après, la nouvelle direction de Nation décide de se représenter. Elle choisit les élections communales. Malgré une campagne de propagande acharnée et un climat politique favorable à l'extrême droite, les résultats de Nation restent, en comparaison avec les précédents succès du FN, insignifiants : un peu plus d'un pourcent à Charleroi et à Forest, mais tout de même plus de quatre pourcents à Evere. Nation est de retour dans les bureaux de vote pour les élections de 2014. Une fois de plus ses résultats sont bien loin des scores de ses partis-frères européens.

Bilan de l'aventure électorale de Nation : il est totalement négatif. Après plusieurs tentatives infructueuses, beaucoup d'énergie militante dépensée et de l'argent investi, le mouvement n'a jamais réussi à obtenir un seul élu, en bientôt vingt ans d'existence. Le Front national de Daniel Féret, moins de trois ans après sa création avait lui déjà fait élire son premier conseiller communal, 
à Molenbeek, puis l'année suivante, ses deux premiers députés régionaux, en 1991 son premier député fédéral, 72 conseillers communaux dans diverses communes bruxelloises et wallonnes aux communales de 1994, etc.


Le dimanche 14 octobre prochain, le mouvement Nation devrait faire élire ses premiers candidats. Mais 
si leur nombre est inférieur aux élus d'AGIR, il est évident que sa direction sera une nouvelle fois remise en cause. Et le turn-over au sein de la base militante de Nation réapparaitra comme de coutume.


NOUVELLE WALLONIE ALTERATIVE (NWA)
En avril 2012, lors de la liquidation définitive du Front national « réunifié », présidé par son ex-député régional wallon Charles Pire, ses principaux « cadres », après avoir tenté une adhésion sans succès au Parti populaire de Michaël Modrikamen, vont créer un nouveau parti politique, sous le nom de Nouvelle Wallonie Alternative (NWA). Très vite cette NWA est caractérisée par un certain amateurisme politique. Essentiellement active sur les réseaux sociaux, les discussions qui s'y déroulent prennent plus les allures de celles du café du commerce que de discussions politiques dignes de ce nom.

La NWA garde des liens politiques avec Nation. Des relations entretenues lors de l'alliance de ce mouvement identitaire avec le FN « rénové » de Charles Pire. Avec le Parti des pensionnés et le parti PLUS, en janvier 2014, la NWA va tenter, malgré les actions judiciaires de Marine Le Pen contre les frontistes belges, de mettre sur orbite un Front d'union National (FuN), dont in fine l'existence ne fut qu’éphémère.

Avec son profil désavantageux, la NWA s'était pourtant présentée aux communales de 2012. Sa capacité militante ne lui permet alors de n'être présente que dans cinq communes wallonnes, pour n’y récolter que des scores ridicules ou nettement inférieurs aux bons résultats du FN de jadis : 2,8 % à Courcelles (contre plus de 10 % pour le FN six ans plus tôt), 2,3 % à Namur, 1,2 % à Gesves, 0,5 % à Orp-Jauche et à Charleroi. Aux régionales de 2014, dans la circonscription de Charleroi, la NWA ne récolte que 0,5 % des suffrages. Pire encore, dans celle de Liège : 0,1 %. Aux législatives qui se déroulent au même moment, il est de 0,3 % dans le canton de Charleroi.

Après leurs importants et humiliants échecs successifs aux élections, les membres de la direction de la Nouvelle Wallonie alternative vont, petit à petit, la quitter en 2015. L'un des membres de sa direction va créer, avec l'Alliance nationaliste wallonne (ANW), les Identitaires Ardennais (dont il sera question plus loin dans la notice sur le Parti des pensionnés).

Vidée de
l'intérieur, la NWA passe dans l'ombre de la scène nationaliste. Jusqu'à sa récupération par Salvatore Russo. Ce Russo est l'ancien secrétaire général de la Fédération des nationalistes wallons (FNW), un pseudopode du Front national « rénové », alors conduit par deux anciens députés régionaux frontistes, Charles Pire (ex-Parti social chrétien) et Charles Petitjean (ancien du Parti réformateur libéral). Lors des communales de 2012, Salvatore Russo est la tête de liste à Charleroi de la FNW (1,98 %). Ensuite, il participe avec Petitjean à la création du Front wallon et conduit sa liste déposée dans le canton de Charleroi aux élections législatives (0,47 %).

Après une tentative sans succès de redynamiser la NWA, Salvatore Russo a annoncé, en août dernier, dans un e-mail reçu par le journal RésistanceS, que son mouvement avait dû subir une «
 tentative de déstabilisation » quand « deux mois avant [les]élections, certains de ceux qui ont abandonné le parti » sont revenus pour essayer « de récupérer le travail effectué ces dernières années ». Pour assurer sa survie, cette Nouvelle Wallonie alternative se présente aux communales et provinciales à venir en cartel avec le mouvement Nation. Salvatore Russo figure en troisième place sur la liste « NWA-Nation » déposée à Charleroi et figure en tête de liste dans le district carolo pour les provinciales.


PARTI DES PENSIONNÉS
Cette formation électorale de défense des personnes du troisième âge voit le jour en 2009 dans la région liégeoise. A son sujet, le Centre de recherche et d'informations socio-politiques (CRISP), dans une de ses publications consacrées aux partis sans représentation parlementaire fédérale parue en 2004, note : « Le Parti des pensionnés se revendique des valeurs de proximité, de réalisme, de bon sens, d'écoute et de respect. ». Il a alors l'objectif de « rassembler des citoyens de toutes sensibilités [...] qui refusent de voir disparaitre leur identité, leur culture, leurs valeurs ». Il affirme être « ni de gauche, ni du centre, ni de droite ». Aux régionales de 2009, le Parti des pensionnés récolte un peu plus de 1 % dans la circonscription de Liège.


A partir de 2012, cette micro-formation va de plus en plus se rapprocher du discours classique de l'extrême droite. Rien d'étonnant : lors des élections communales de cette année-là, sa liste déposée à Liège-ville est conduite par un dénommé Joseph Franz. Un habitué du nomadisme électoral d'extrême droite. Aux régionales de 2004, il figurait sur la liste liégeoise du Bloc national
, une des énièmes scissions du Front national. Auparavant, le même Franz fit partie, dès les années 1970, d'une multitude de formations nationalistes d'ultradroite : Front de la jeunesse, CEPIC (l'aile conservatrice du Parti social chrétien), AGIR (premier du nom), Front national de Daniel Féret, Droite nationale, Front nouveau de Belgique (FNB), Force nationale ...

Une fois sous la coupe de Joseph Franz, le Parti des pensionnés va s'engager clairement à la droite de la droite radicale. En 2015, il met sur pied un cartel électoral, du nom d'« Agir pour la démocratie » (sic), en vue des actuelles communales, avec l'Alliance nationaliste wallonne (ANW), une autre petite formation politique fondée la même année, par un militaire retraité qui avait déjà lui aussi été, comme Franz, encarté au FN, mais également au PS et au Parti populaire. Le projet de cartel s'arrêta bien vite. L'ANW changea de nom en 2017 pour prendre celui des « Identitaires Ardenne », puis d'Alliance identitaire Ardennaise (AIA). Des identitaires qui, l'année dernière, allèrent défrayer la chronique judiciaire lors de perquisitions et de l'arrestation de deux de leurs dirigeants pour incitation à la haine et à la violence raciale.

Retour de l'info sur le Parti 
des pensionnés. Ses propos sont souvent, faut-il s'en étonner, excessifs. Surtout à propos de la religion musulmane. « Nous devons expulser les nouveaux colonisateurs. Stop à l'islamisation de notre Pays », proclame-t-il en août 2013 sur sa page Facebook. Autre extrait, dans un « message aux colons musulmans » : « L'islam n'est pas une religion, mais un projet politique et social appuyé sur une manipulation du sacré. L'islam est une secte et doit être considéré comme telle ».

Sur son site Internet, on peut lire en avril 2014, à propos des « 
partis traditionnels », que sont pour le Parti des pensionnés, le PS, le MR, le CDH et Ecolo, ceci : « ils laissent entrer dans notre pays une immigration non souhaitée, en laissant s'implanter un système politico religieux l'Islam en contradiction totale avec notre système démocratique, nos traditions, nos lois et notre conception de la religion ». C'est pour cette raison que le Parti des pensionnés propose un coup de balai contre « ces politiciens dont le métier est de s'enrichir avec notre argent ».

Le nouveau dirigeant du Parti des pensionnés ne va pas oublier également de s'attaquer aux autres formations de sa propre famille politique. Pour Franz, les « 
chefs » du Front wallon de l'ex-député régional frontiste Charles Petitjean, du mouvement Nation, de la Nouvelle Wallonie alternative (NWA), mais également du Parti populaire et de ses dissidents fondateurs de Valeurs libérales citoyennes (VLC), ne sont que des« bouffons » (sic). Face à eux, il préconise l'émergence d' « un vrai parti populiste dans la lignée » de celui conduit en France par Marine Le Pen.

Trois ans plus tard, en mai 2017, toujours dans la perspective d'un cartel pour les élections, le Parti des pensionnés va néanmoins créer, avec le mouvement Nation et les flamands de la Nieuw-Solidaristisch Alternatief (N-SA), la Coordination patriotique (sur celle-ci revoir l'épisode 2 du dossier élections 2
018 de RésistanceS). Habituel des retournements de veste, Joseph Franz et sa minuscule formation vont ensuite claquer la porte de cette coordination. Il prend alors en main la mise en route de la section liégeoise du « nouveau » parti politique AGIR. Dimanche 14 octobre prochain, son nom figurera sur les bulletins de vote pour ses listes communales et provinciales locales. Il signe ainsi son retour dans le giron de l'ex-Front national belge.



PARTI WALLON
A ne pas confondre avec d'autres formations du même nom qui ont émaillé l'histoire du « mouvement wallon ». Il s'agit ici d'un petit parti localisé désormais uniquement dans la commune de La Louvière. Le « PW » est issu de « Wallon », une formation électorale qui est apparue aux élections législatives de 1981 en déposant des listes dans cinq arrondissements du Hainaut : Charleroi, Mons, Soignies, Thuin et Tournai-Ath- Mouscron. Des listes « Wallon » seront ensuite proposées aux électeurs, ici et là, aux communales de 1982, régionales de 1995, 1999 et 2004 et législatives de 1995 et 1999. Avec à chaque fois des résultats dérisoires, à l'exception de ceux obtenus à Charleroi.

Dans la ville de La Louvière, en 2006, une liste « Wallon » se présente aux communales. Sa tête de liste se nomme Christian Gelay. Une personnalité locale déjà connue comme ayant été le meneur du Front national à La Louvière lors des élections communales de 1994. C'est dans cette commune du Hainaut oriental que le FN avait fait cette année-là son meilleur score en Wallonie, avec plus de 14 %. Avec cinq autres candidats frontistes, Gelay fut propulsé au conseil communal louviérois. Peu de temps après, il démissionna du parti d'extrême dro
ite afin de participer, avec d'autres dissidents frontistes, à la création d’une nouvelle formation, la Droite nationale. Aux élections législatives de 1999, Christian Gelay est à nouveau tête de liste, mais cette fois-ci sous l'étiquette de Vivant, la formation éphémère ultralibérale de l'entrepreneur milliardaire flamand Roland Duchâtelet.

Retour aux communales de 2006. La liste « Wallon » conduite par Gelay fait mois de 2 %. Six ans plus tard, elle se représente sous la dénomination de « Parti wallon », mais également avec pour sigle le drapeau belge, ce qui représente un vice de forme avec la nature idéologique du mouvement wallon historique. Ce PW local dépasse la barre des 2 %. Sans élu, il se met en hibernation politique. Jusqu'au lancement de la campagne pour les communales et provinciales de cette année où le Parti wallon s'est fondu pour l'occasion dans AGIR, le « nouveau » parti mit en place par le « canal historique » du Front national. Autre formation fusionnée, le Parti des pensionnés de Joseph Franz (revoir sa notice ci-dessus), lui aussi ancien du FN et fondateur de la Droite nationale qu'avait rejoint, voici vingt-trois ans, Christian Gelay.

Pour ce 14 octobre, c'est le même Gelay qui conduit la liste d'AGIR, dans sa commune, avec huit autres candidats, etse trouve en troisième place sur sa liste pour le district provincial de La Louvière. Dans son tract électoral, la section locale d'AGIR conduite par le leader du Parti wallon proclame : « Si vous êtes d'accord avec Ecolo et le PTB qui veulent une immigration massive et incontrôlée de notre beau pays, alors, surtout ne changez rien ! SINON, dites ''NON'', et rejoignez notre combat. Agir maintenant contre la charia, votez AGIR ». Un retour politique manifeste aux sources du frontisme de sa belle époque.

SECTION DU PARTI POPULAIRE
A la mi-septembre, tout juste avant le dépôt des listes pour ces élections, le parti AGIR accueille dans ses rangs une section quasi entière du Parti populaire (PP), celle d'Ath-Tournai-Mouscron, soit environ une trentaine de nouveaux affiliés, ce qui n'est pas négligeable pour un « nouveau » parti. Les transfuges du PP sont conduits par Stéphane Deraeve, alors chef local du parti de l'avocat bruxellois Mischaël Modrikamen. Après sa rupture, sur des vidéos diffusées sur Facebook, il dénonce, « le système féodal de l'empire de Michaël et Ysamine [l'épouse du premier et vice-présidente du PP] ». 

Le 27 septembre dernier, Stéphane Deraeve écrit sur son mur du réseau social : « 
Ne soyez plus dupe avec le Parti Populaire c'est le parti de la tromperie ». Son espoir ? Sans doute que d'autres« pépéistes » viennent encore à AGIR après les élections. Pour l'heure, l'ex-responsable local du PP dans le Hainaut occidental bat campagne pour les élections provinciales en tant que tête de liste dans l'entité de Tournai d'AGIR.


SIMON HARYS

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