La « marche noire » contre Dutroux infiltrée par l'extrême droite

RésistanceS Observatoire belge de l'extrême droite | Dimanche 20 octobre 2019 13 h 33  Réactualisation : 16 h 52


La délégation de La Dissidence de Nation, ce dimanche à Bruxelles, à la « Marche noire » contre Dutroux – Image RTL-TVi. 
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CE DIMANCHE À BRUXELLES – Au moment d'écrire ces lignes, une « Marche noire » contre la demande de libération de Marc Dutroux, le criminel le plus détesté de Belgique, va démarrer de la gare de Bruxelles-Nord. Parmi ses quelques manifestants déjà réunis (moins d'une centaine), le journal RésistanceS a repéré une petite quinzaine de militants d'extrême droite, de La Dissidence et du Mouvement Nation. Issue d'une scission du second, la première démontre sa capacité de mobilisation – QUI GAGNERA LE LEADERSHIP DE L'EXTRÊME DROITE FRANCOPHONE ?

Il fallait s'y attendre. Comme à son habitude, l'extrême droite profite des rassemblements de protestation, organisées depuis 1996, dans le dossier judiciaire de Marc Dutroux et ses complices. Cela est encore le cas à la « Marche noire », organisée ce dimanche à partir de 14 heures à Bruxelles, contre la demande de libération du plus emblématique criminel du royaume, auteur il y a 23 ans, d’enlèvements de jeunes filles, et de la mort de deux enfants, Julie et Mélissa, et de deux adolescentes, Ann et Eefje.

DÉPUTÉ WALLON FRONT NATIONAL. Lors du reportage de RTL-TVI, en direct de la Marche noire, pour son 13 h, le journal RésistanceS a pu repérer une dizaine de militants et de responsables du mouvement identitaire La Dissidence. Parmi eux, quatre de ses chefs en personne, Olivier Balfroid (alias « Olivier Frapchot »), Eddy De Smedt, Jean-Pierre Borbouse et Pascal Cornet. Ils étaient accompagnés également de Chris Berteryan, un militant néonazi flamand, actif depuis les années 1990, dans des groupuscules tant francophones que néerlandophones. Les trois premiers proviennent de la direction du Front national belge. Balfroid en fut un de ses cadres namurois de l'ombre (il ne s'est jamais présenté aux élections), De Smedt en a été l'un de ses responsables bruxellois et Borbouse, l'un de ses conseillers communaux à Charleroi et l'un de ses députés régionaux wallons. Après l'implosion du FN belge en 2007, ils ont rejoint - à des moments différents - le Mouvement Nation, formé en 1999 par des dissidents du Front nouveau de Belgique (FNB) et du FN. Pascal Cornet a été pour sa part pendant plusieurs années, au poste de secrétaire général, le numéro deux de Nation.

 
Chris Berteryan, ancien activiste du groupe 
néonazi L'Assaut et fondateur des Autonome
Nationalisten Vlaanderen (ANV), ce dimanche
avec La Dissidence de Nation – Image RTL-TVi. 
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En septembre dernier, ces quatre activistes d'extrême droite de longues dates ont conduit, avec d'autres cadres et la moitié des affiliés de Nation, une scission au sein de ce mouvement qui tente depuis sa création, sans succès, d'unifier la « droite nationaliste, identitaire et patriotique », en Wallonie et à Bruxelles. Les scissionnistes s'activent sous le nom provisoire de « La Dissidence de Nation » (voir l'enquête de RésistanceS.be sur celle-ci ici). Prochainement, un nom définitif pour ce nouveau parti sera dévoilé.

MARCHE NOIRE INFILTRÉE PAR L'EXTRÊME DROITE. Sous une pluie battante ce dimanche, une heure avant le départ de la « Marche noire » organisée contre la demande de la libération de Marc Dutroux, au pied de la gare Bruxelles-Nord, Olivier Balfroid, Eddy De Smedt, Jean-Pierre Borbouse et Chris Berteryan conduisaient la petite délégation de la Dissidence. Pour l'occasion, un calicot a été fait. Avec pour slogan : « Pas de liberté pour les bourreaux d'enfants ! ». De son côté, le Mouvement Nation n'a pas lancé de mobilisation large, ni sur son site Internet ni sur ses réseaux sociaux, comme à ses habitudes, pour que ses derniers militants participent à ce rassemblement anti-Dutroux de ce dimanche. Une preuve de plus que la dissidence, formée le mois dernier, a causé un schisme coupant réellement en deux clans, ce mouvement groupusculaire d'extrême droite (moins de cinquante membres de part et d'autre, dont seulement une trentaine de militants mobilisables).

Le chef de La Dissidence, Olivier Balfroid (à droite de l'image), derrière le journaliste de RTL-TVi en direct à la « marche noire ».
Image RTL-TVi. 
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Depuis l'annonce de la demande de libération du criminel Dutroux, Nation a planifié une campagne de propagande timide contre celle-ci. En 2012, ce mouvement avait réussi avec succès, une mobilisation bien plus offensive contre la libération de Michèle Martin, l'ex-épouse de Dutroux. Son but est toujours de recruter au sein de ceux qui expriment leur opposition totale à la libération de Marc Dutroux, hyper médiatisée pour l'instant. Hier, sur son mur Facebook, Hervé Van Laethem, son président s'est contenté d'écrire : « je maintiens qu'il faut pendre les pédophiles ». Sur son blog réservé à ses activistes, Nation a juste annoncé qu'il « ralliera la marche noire de Bruxelles contre la justice corrompue et complaisante envers les pires crapules ». Pour l'heure, ce sont ses dissidents qui lui ont volé la vedette au journal télévisé de RTL-TVI en y étant bien plus nombreux. Dans la « guerre de l'info », La Dissidence est passée devant le Mouvement Nation. Et a même pris la tête de la Marche noire qui n'a rassemblé au final que 500 participants.

Sans banderoles, ni slogans, bien peu nombreux (seuls les quelques militants de la section liégeoise y étaient) et avec beaucoup d’absents, dont son ancien président Jean-Pierre Demol qui semble ne pas encore avoir choisir son camp, le Mouvement Nation semble être toujours groggy depuis le clash interne de la fin septembre. Le journal RésistanceS reviendra très prochainement sur cette situation à risque pour l'avenir même de Nation. 


ALEXANDRE VICK
RésistanceS Observatoire belge de l'extrême droite | 


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de basket installé en Belgique, ici au Samedi de résistance(s) au théâtre
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