L'avocat en complot-veston

RésistanceS | Observatoire belge de l’extrême droite | Bruxelles | Vendredi 9 août 2019  | Première publication in « Le Journal de RésistanceS », n°1, mai-juin 2019, page 7, périodique papier de notre web-journal

Mai 2014, Sébastien Courtoy à l'issue du procès contre RésistanceS.be de l'un
de ses clients préférés, l'ex-secrétaire national du FN belge
© Photo RésistanceS.be - Bart Lemmens.


ROBES NOIRES & CHEMISES BRUNES - Connu pour ses débordements, Sébastien Courtoy, le défenseur des « fachos » et des « islamos radicaux » n’aura jamais aussi bien porté son surnom que pendant le procès de l’attentat au Musée Juif de Belgique Par JEAN-PIERRE DE STAERCKE Journaliste judiciaire, membre de la rédaction du journal « RésistanceS ».

Il a acquis une sacrée réputation, ce Sébastien Courtoy, spécialisé dans les causes extrêmes. Monstre de culture, il est doté d’une mémoire colossale et d’une grande facilité oratoire que trahissent encore cependant des élans adolescents. Il a pourtant déjà 44 ans, ce bulldozer des cours et tribunaux. Ses interventions ne sont jamais banales.

La clé de voûte de son succès dans les procès d’islamistes radicaux fut, voici une dizaine d’années, la défense qu’il adopta au procès de deux responsables du Centre islamique belge, le CIB, un tout petit groupe qui ne rassemble que quelques extrémistes malgré son nom. Ses clients étaient poursuivis pour négationnisme et antisémitisme. Ce procès devant le tribunal correctionnel de Bruxelles fut émaillé d’incidents.


Coups de ciseau

À deux reprises, le bâtonnier dut intervenir à propos des conclusions écrites de MCourtoy. À l’entendre, c’était le parquet qui était négationniste.Ses allusions antisémites et ses appels à bafouer les lois en
vigueur lui ont valu quelques coups de ciseau. Cet avocat, grand par la taille – quelque deux mètres – fut sanctionné aussi par le conseil de l’ordre pour une photo (ci-contre) diffusée où on le voyait faire une « quenelle dieudonniste » avec son confrère MeLaquay junior, avocat du groupuscule intégriste d'extrême droite Belgique & Chrétienté dans le procès perdu, en 2007, contre le web-journal « RésistanceS ». Les deux avocats y figurent en compagnie de l'humoriste Dieudonné qui s'est allié à Jean-Marie Le Pen en personne depuis 2006.

Car Courtoy est aussi, comme Laquay, le conseil de Dieudonné, pourchassé de tout côté pour racisme anti-juifs. Mais revenons au procès du CIB. Hormis ses outrances, le plaideur avait passé à la loupe toutes les astuces de toutes les procédures pour réclamer l’irrecevabilité des poursuites, c’est-à-dire un acquittement technique. Si, par impossible, les prévenus n’étaient pas relaxés, ils devaient être acquittés en bonne et due forme, aux yeux de la défense.

La juge n’avait pas suivi et avait condamné chaque prévenu à dix mois d’emprisonnement avec sursis pour la moitié. Mais, surprise en appel, seule une prévention d’antisémitisme avait été retenue et les clients de MeCourtoy avaient écopé d’amendes avec sursis !


Et bonapartiste en plus !

Le tapage autour de ce procès fut tel que, comme une traînée de poudre, la réputation de celui qui se proclame bonapartiste a gagné toutes les sphères extrêmes, y compris les partisans d’un « Ordre Nouveau » et du Front national, notamment. Au moment de l’arrestation à Marseille de Mehdi Nemmouche, « soldat » de l'Organisation de l'État islamique (OEI/Daesh) alors soupçonné d'être l'auteur du massacre terroriste commis le 24 mai 2015 au Musée juif de Belgique, beaucoup d’observateurs avaient misé sur Courtoy pour défendre l’accusé. Et ils avaient tapé juste.

Comme on le sait, au procès de l’attentat du Musée juif, le plaideur a adopté la thèse d’un complot extérieur pour exonérer son client. De révéler que, prétendument, le couple assassiné appartenait au Mossad, le plus connu des services secrets israéliens. Du même coup, les deux autres victimes de l’attentat étaient visées elles aussi, non pas dans le cadre du djihad mais par ce double assassinat ciblé.

Pour rappel, le jury et la cour d’assises de Bruxelles n’ont rien gardé de ce système de défense et ont condamné à perpétuité Nemmouche, le principal protagoniste de l’attentat antisémite. Entre temps, il fallut entendre, en début de procès, qu’un «journaliste fainéant », selon l’expression de Courtoy, aurait conclu à un règlement de compte au sein du Mossad ? En d’autres mots, la direction du service de renseignement aurait procédé à l’élimination de quatre de ses agents. Un argument qui est encore revenu un peu plus tard sur les bancs de la défense.

Oui, il y a bien eu un axe complotiste du côté des plaideurs. De quoi faire dire que Sébastien Courtoy porte bien son surnom d’avocat en « complot-veston ».


JEAN-PIERRE DE STAERCKE
RésistanceS  Observatoire belge de l'extrême droite 



    Qui est l'auteur de cet article ?
    Diplômé de l'Université Libre de Bruxelles (ULB), Jean-Pierre De Staercke est journaliste professionnel depuis le début des années quatre-vingt. Il couvre les plus grands procès du Royaume. Comme chroniqueur judiciaire, il a écrit pour divers journaux (« Le Peuple », « L'Instant », « La Dernière Heure »...). En 2019, il est toujours le correspondant dans les palais de justice de notre pays pour le quotidien « L'Avenir ». Ancien de la rédaction des revues franco-belges d'information contre l'extrême droite « Article.31 » et « CelsiuS », Jean-Pierre De Staercke participe en 1997 à la création du journal « RésistanceS », il est notamment le responsable de sa chronique judiciaire de l'époque, « Robes noirs & chemises brunes », et depuis, il est toujours membre de son comité de rédaction.


    L'article que vous venez de lire a été publié une première fois dans notre périodique papier  « Le Journal de RésistanceS », n°1, mai-juin 2019, page 7. La légende de la photo de celui-ci :


    SUR LA PHOTO
    Palais de Justice de Bruxelles, Sébastien Courtoy avec le journaliste identitaire Olivier Mukuna, après le procès du secrétaire national du FN belge intenté contre le web-journal « RésistanceS » en 2014. Lors de celui-ci une alliance informelle s'était scellée entre l'ex-chef frontiste et un groupuscule identitaire racisé dont des membres étaient venus au procès pour soutenir le premier. Une présence planifiée en détails qui sera exploitée dans la plaidoirie de Courtoy © Photo RésistanceS - Bart Lemmens.



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