Le FN belge fête ses 25 ans d'âge en espérant se relancer en 2012

RésistanceS | Observatoire belge de l’extrême droite  | 29 octobre 2010 | Rep./Mod n° 2022-0823

Salvatore Nicotra et Daniel Féret, les derniers chefs du Front national belge 

© Photo : RIDAF Charleroi - RésistanceS


 

ÉTAT DES LIEUX | Le Front national, complètement marginalisé, est aujourd'hui divisé dans notre pays, en deux clans opposés. Leur enjeu : la récupération de la propriété du sigle et du nom de ce parti d'extrême droite. En vue d'un retour espéré sur la scène politique en 2012, lors des prochaines communales et en profitant d'un succès déjà annoncé de Marine Le Pen à la Présidentielle française. Ce 30 octobre, l'asbl fondatrice du frontisme en Belgique fêtera, près de Charleroi, ses 25 ans d'existence. Sous haute tension : ses dissidents deviennent de plus en plus menaçant à son égard. La guerre de clans pourrait être « sanglante » | L’AVENIR DE L’EXTRÊME DROITE FRANCOPHONE EN JEU !


L'association sans but lucratif « Front National-Nationaal front » (FN-NF) a été fondée en 1985 autour de Daniel Féret, dans la capitale belge. Cette asbl est la couverture légale et historique du parti politique du même nom. Suite à sa condamnation pour racisme en 2006 et l'implosion du Front national l'année d'après, Féret s'est mis en retraite politique et s'est exilé dans sa villa luxueuse du Sud de la France, au Cap d'Agde. 

 

En août 2009, au cours d'une assemblée générale, Salvatore Nicotra, fidèle homme de confiance de Daniel Féret, lui a succédé à la présidence de l'asbl FN-NF. Depuis, ce jeune conseiller communal, à Fleurus, petite commune wallonne près de la ville de Charleroi, s'est dépensé sans compter pour restructurer la formation politique d'extrême droite qui eut dans la région carolo ses heures de gloire à plusieurs élections.


Ce samedi 30 octobre, une réception se donnera pour fêter les 25 ans d'existence de l'asbl FN-NF. Les festivités frontistes auront lieu à Fleurus, au siège administratif de l'association de gestion du parti. Un second événement, toujours à l'occasion de son anniversaire, aura lieu cette fois-ci à Bruxelles, le 26 novembre prochain. Sans doute dans un café de la commune de Saint-Gilles. Plusieurs figures relativement importantes de l'histoire du Front national sont annoncées ce samedi à la fête du FN-NF : des transfuges de dissidences frontistes et du mouvement néofasciste Nation notamment, comme Emanuele Licari di Castel Mola (ancien président du Front national des jeunes, FNJ, passé ensuite à Nation), la tête de liste bruxelloise aux régionales de 2009 des Forces nouvelles belges (FNB, liste électorale mise en place sous l'égide de Patrick Cocriamont), l'un des avocats de plusieurs repris de justice d'extrême droite, l'abbé Christian Haudegand (membre de la direction du mouvement Wallonie d'abord !)... Une soixante de personnes devrait être présente ce samedi au 25 ans du parti frontiste.

FN CANAL HISTORIQUE CONTRE FN BIS

Mais la tension sera aussi certainement au rendez-vous, puisque des dissidents du « FN canal historique » ont également annoncé une présence musclée à Fleurus. Des « crânes rasés » - liés à Nation - pourraient se rendre jusqu'aux portes du siège du FN-NF. De plus en plus sous tension à cause du maintien de la structure historique du parti, ses opposants sont rassemblés dans un autre « clan frontiste », qui se présente comme étant le « FN réunifié ». Ce dernier est présidé par Patrick Cocriamont, député fédéral du parti de 2004 à 2010. On y retrouve aussi les ex-députés régionaux wallons Charles Pire et Charles Petitjean, fondateurs d'une Fédération des nationalistes wallons (FNW) des plus fantomatiques sur le terrain politique, les lieutenants du désormais ancien sénateur Michel Delacroix et de l'ex-député régional Daniel Huygens, ainsi que les restes du mouvement néofasciste Nation, qui après plusieurs expériences électorales désastreuses s'est soumis à l'idée qu'en dehors du Front national, il n'y avait plus d'autre alternative ni opposition nationaliste possible.

 

GUERRE DEVANT LES TRIBUNAUX

Les deux FN en présence se livrent à une guéguerre interminable, à coup de procès et de campagnes en-dessous de la ceinture. Tous deux, ils se disputent toujours à l'heure actuelle l'héritage du Front national historique. Ce 28 octobre, une décision du tribunal de première instance de Liège a donné raison aux dissidents du « FN canal historique » : elle interdit à Salvatore Nicotra d’user à quelque titre que ce soit, personnellement ou indirectement, la flamme tricolore (le sigle du FN depuis sa création) et le nom «Front national». Mais Salvatore Nicotra ne compte pas en rester là. Il interjettera appel de cette décision. Par ailleurs, en septembre dernier, lui aussi, était déjà passé à l'offensive judiciaire contre ses adversaires en déposant plainte au pénal, auprès de la Procureure du roi de Liège, Danièle Reynders. La plainte en question cible nommément l'avocat des dissidents frontistes pour menaces, harcèlement et procédure illégale. Action judiciaire doublée d'une plainte pour les mêmes motifs déposée auprès du Bâtonnier du Barreau de Liège. La saga judiciaire entre les frontistes donnera sans doute lieu à de nouveaux rebondissements, dans les mois à venir.


Indépendamment de ce versant judiciaire à sa via politique, le FN-NF de Nicotra va continuer, dans l'attente d'un nouveau procès, à utiliser le nom Front national. Comme d'ailleurs ses ennemis internes à sa famille politique.


CHEF FRONTISTE PRAGMATIQUE

Malgré son incapacité de reprise du leadership du frontisme durant les législatives de juin de cette année, le FN-NF de Nicotra est néanmoins redevenu le plus actif et le mieux structuré des deux clans frontistes. Et surtout le plus stable, ce qui est contre nature dans les rangs de l'extrême droite francophone. Ce Front édite un mensuel largement diffusé auprès des adhérents et des sympathisants, contrairement au FN de Cocriamont qui n'a plus été capable d'éditer le sien depuis plus de six mois déjà ! L'asbl FN-NF multiplie encore les contacts pour relancer le Front national en Belgique à l'occasion des prochains scrutins. Des relations à l'étranger ont aussi été enclenchées, notamment avec les Sverigedemokraterna (SD), le parti d'extrême droite de Suède sorti victorieux aux élections générales en septembre passé. Depuis les années nonante, les SD sont aussi soutenus par le FN de Jean-Marie Le Pen.


Salvatore Nicotra est un pragmatique et donc un bon stratège. Depuis sa prise de fonction à la tête du FN-NF, il y a plus d'un an, il a tout fait pour éviter les erreurs commises jadis par Daniel Féret. Des erreurs qui firent implosées à deux reprises le Front, en 1995 et en 2007. Chez lui, il n'y aura pas de place pour les éléments nuisibles au développement consolidé du parti, ni pour les transfuges opportunistes de l'autre clan frontiste ni pour ses « nazebroques » (sic) constitués des « exclus du Front national pour nazisteries » (resic), comme Patrick Cocriamont ou Michel Delacroix, par exemple.



DOC. EXCLUSIF - L'officiel carton d'invitation de la fête du 25e anniversaire du Front national belge. Celle-ci aura lieu chez Salvatore Nicotra, conseiller communal et de l'action sociale frontiste à Fleurus et président de l'asbl fondatrice du FN en Belgique - Doc. RésistanceS




AVEC MARINE, LE RETOUR DU FN EN 2012 ?

Dans la perspective de dédiaboliser sa formation politique, en juin dernier, juste après les élections législatives anticipées, Salvatore Nicotra avait déjà commencer à donner « un coup de balai ». Il demanda à un des membres de la direction de son asbl, Georges Demoulin, de quitter celle-ci illico presto. Cet administrateur frontiste en question était alors déjà connu comme étant un négationniste acharné et un obsédé de la présence massive des Juifs dans la société, y compris au sein du FN ! (voir à son sujet notre article « Un (ancien) dirigeant du Front national publie un livre négationniste »).


Sentant le vent tourner et certainement déprimé du Waterloo électoral qu'il venait de subir, peu de temps après, en juillet, « GPT », le chef de la campagne électoral de l'autre FN tenta d'adhérer à l'asbl FN-NF de Nicotra. Sans succès : le 21 juillet dernier, par courrier, le « comité de gestion du Front national-Nationaal front » informa l'intéressé qu'« un avis défavorable à (son) adhésion à la formation politique » avait été émis à son sujet. Le montant de sa cotisation déjà préalablement versé, 5 euros, lui fut ensuite remboursée, avec en communication sur le virement la mention : « adhésion refusée ». Depuis, l'adhérent-exclu en question est revenu à la casse de départ, chez ses anciens compagnons du FN bis.


Refusant la « nazification » et la paralysie de ses rangs dans d'interminables conflits internes, par des « nazebroques » et autres « tires-au-flanc », le FN-NF espère pouvoir faire rebondir le parti d'extrême droite, sur une base national-populiste, à l'occasion des prochaines élections communales de 2012. Une année déterminante pour l'avenir ou non du frontisme en Belgique. Une fois de plus, ses partisans auront leur regard tourné vers la France en espérant que Marine Le Pen, après avoir obtenu la présidence du FN de son père, en janvier de l'année prochaine, se retrouve en bonne position au premier tour de l'élection présidentielle de 2012, comme lui prédisent d'actuels sondages. Les urnes ont toujours été bénéfiques au FN belge quand en France, son modèle français gagnait des scrutins.

Dans l'attente de 2012, l'asbl FN-NF de Salvatore Nicotra vient de relancer une campagne d'adhésion en mettant déjà en vente les cartes de membre pour l'année 2011. Bien avant le FN bis. Dans la guerre des chiffres, il parait donc évident, comme pour cette année, qu'une fois encore c'est le « FN canal historique » qui la gagnera. Et pourra fêter les 25 ans du «frontisme nationaliste» à la belge sans « nazebroques » et autres empêcheurs de « frontiser » en rond...



SIMON HARYS

RésistanceS | Observatoire belge de l’extrême droite




 


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