RésistanceS | Observatoire belge de l'extrême droite | Jeudi 1er août 2019
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Muriel Targnion lors de la manifestation anti-Francken le 19 février dernier - Image réseau social |
ANALYSE – La bourgmestre de Verviers, Muriel Targnion, affiche un double visage. Rouge vif, lorsqu'elle monte en première ligne pour contrer Théo Francken. Rouge fric, lorsqu'elle s'offre un joli cumul financier qui fait jaser, y compris dans son propre parti, le PS. Depuis plusieurs mois, cette – très – proche de Stéphane Moreau adopte un comportement erratique qui fait le jeu des populistes – D'UNE DÉRIVE.
Muriel Targnion a eu son heure de gloire le 19 février dernier. Ce jour-là, l'ex-Secrétaire d'État à l'Asile et à la Migration, Théo Francken (N-VA) vient présenter son livre « Continent sans frontière », dans une conférence-débat programmée à l'hôtel « Verviers ». L'ambiance est pour le moins tendue. Pendant qu'une centaine de personnes globalement pro-Francken – dont plusieurs sympathisants d'extrême droite - attendent dans la salle de conférence l'arrivée de la vedette du jour, à l'extérieur, deux cents syndicalistes et militants de gauche se sont mobilisés pour protester contre la venue du sulfureux Francken.
La polémique Targnion
Le comité d'accueil est bouillant. Dans ses rangs, la bourgmestre de Verviers en personne. Muriel Targnion est très remontée. Elle traite les partisans du leader de la tendance radicale de la N-VA de « connards d'extrémistes » (sic). Jets de chaises et de pavés, insultes... Affirmant ne pas se sentir en sécurité, Théo Francken rebrousse chemin. La conférence est annulée. La polémique Targnion commence.
En tant que cheffe de la zone de police de Verviers, avait-elle le droit de prendre place parmi les contre-manifestants de gauche ? « J'ai le droit de manifester comme n'importe qui », affirme la bourgmestre. C'est loin d'être l'avis de tout le monde. Le ministre de l'Intérieur, Pieter De Crem (C D&V), demande une enquête à l'Inspection générale de la police fédérale et de la police locale, sur la façon dont Muriel Targnion a exercé son autorité administrative.
La haine sur le Net
Dès le lendemain des incidents, des centaines de messages haineux ciblent Muriel Targnion sur les réseaux sociaux. Les menaces donnent froid dans le dos : « On va cramer ta voiture ! ». « Nous allons passer dans ta baraque ! »... Inquiète pour sa sécurité et celle de sa fille de huit ans, au bord du craquage, Targnionse fait remplacer au poste de bourgmestre. Couverte par un certificat médical, elle disparaît des radars, après avoir déposé plainte en se portant partie civile.
Le 5 avril, le rapport de l'Inspection générale de la police est rendu public. Il est cinglant pour Targnion . L'attitude de la bourgmestre lors de la manifestation devant l'hôtel qui aurait dû accueillir la conférence-débat de Théo Francken « n'a pas créé une condition favorable à la sécurité, rendant la mission de la police d'assurer le maintien de l'ordre plus délicate, voire difficile ».
Un retour tonitruant
Muriel Targnion reprend son poste de bourgmestre début juin. Un retour en fanfare. Le 25 juin, le conseil d'administration du fournisseur d'énergie Luminus la désigne au poste de « conseiller ». Surprise, car Targnion n'affiche aucune expérience dans le secteur. Surprise aussi, teintée d'incompréhension, car le poste est généreusement rémunéré (environ 30.000 euros/an). Le président du Parti socialiste, Elio Di Rupo, est fou furieux et qualifie ce cumul d' « inacceptable ». A peine sorti (en partie) de la bourrasque Publifin, le PS n'a pas envie d'être à nouveau sur la sellette à cause du dérapage d'un des siens.
Mais Muriel Targnion a-t-elle dérapé ? Légalement, non. En effet, si les nouveaux décrets wallons de bonne gouvernance stipulent qu'il est interdit de rémunérer de tels conseillers, Luminus échappe à la tutelle wallonne, car elle est majoritairement française (détenue par EDF). Il n'empêche, avec ce cumul, la bourgmestre de Verviers donne le mauvais exemple, elle qui est par ailleurs présidente du conseil d'administration d'Enodia (le nouveau nom de Publifin), un poste non rémunéré celui-là. Puisque tout est légal, Muriel Targnion ne voit pas où est le problème. Pour une socialiste, c'est assez sidérant.
Rapport décomplexé à l'argent
Tout au long du scandale financier Publifin, Muriel Targnion - qui là aussi donnait l'impression de ne pas voir où était le problème - n'a pas dévié de sa ligne : en gros, total soutien à l'affairiste Stéphane Moreau, à l'époque patron tout-puissant de Publifin-Néthys, exclu du PS en avril 2017. Aujourd'hui administrateur-délégué de Néthys, Stéphane Moreau n'a pas fini de faire des croche-pieds à son ancien parti.
Muriel Targnion – très – proche de Moreau, et protégée par l'ex-ministre de l'Économie wallonne, Jean-Claude Marcourt, fait partie de ces socialistes qui ont un rapport décomplexé àl'argent. Ils n'éprouvent aucun état d'âme à maximiser leurs rémunérations, au risque de choquer le peuple de gauche, et au-delà, la grande majorité des citoyens. Au risque de faire le jeu des populistes qui prospèrent toujours sur la cupidité et l'éthique défaillante de certains de nos élus.
CLAUDE DEMELENNE
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