RésistanceS | Observatoire belge de l'extrême droite | Samedi 27 juillet 2019
L'UNION DES DROITES – Lors du méga scrutin du 26 mai dernier, le Parti Populaire, les Listes Destexhe et La Droite, les trois formations à « la droite de la droite » du MR ont réussi un « exploit » peu banal : ils n'ont pas obtenu le moindre élu dans les différentes assemblées. La droite réactionnaire a été balayée du paysage politique en Belgique francophone. Malgré un contexte politique en Europe favorable aux « populistes ». Pour rebondir après la déroute, certains « cadres » des trois formations de droite radicale belges ont voulu jeter les bases d'une nouvelle formation unitaire, étiquetée « libérale-conservatrice ». Pas simple, car les rivalités entre petits chefs, qui s'accusent mutuellement de flirter avec l'extrême droite, sont tenaces – UNE CHIMÈRE ?
(*) « Journalisme et services secrets, compatibles ? », interview de Claude Moniquet par Manuel Abramowicz, publiée dans le mensuel belge « Même Pas Peur », n°4, novembre-décembre 2015, page 19
PLUS D'INFOS SUR « LA DROITE DE LA DROITE »
Quelques liens vers des articles du journal RésistanceS pour comprendre les racines idéologiques, mais aussi les échecs de cette droite nationale-populiste radicale (liste non-exhaustive) :
Affiches électorales pour le méga scrutin du 26 mai 2019 © Photo RésistanceS |
L'UNION DES DROITES – Lors du méga scrutin du 26 mai dernier, le Parti Populaire, les Listes Destexhe et La Droite, les trois formations à « la droite de la droite » du MR ont réussi un « exploit » peu banal : ils n'ont pas obtenu le moindre élu dans les différentes assemblées. La droite réactionnaire a été balayée du paysage politique en Belgique francophone. Malgré un contexte politique en Europe favorable aux « populistes ». Pour rebondir après la déroute, certains « cadres » des trois formations de droite radicale belges ont voulu jeter les bases d'une nouvelle formation unitaire, étiquetée « libérale-conservatrice ». Pas simple, car les rivalités entre petits chefs, qui s'accusent mutuellement de flirter avec l'extrême droite, sont tenaces – UNE CHIMÈRE ?
La Belgique francophone est une exception en Europe, un pays - ou plutôt un demi-pays – où « la droite de la droite » traverse en permanence un désert total. Scores faméliques, pas de représentation parlementaire, bisbrouilles internes sans fin, noms d'oiseaux qui s'échangent sur le Net... Tout cela ne fait pas sérieux. Le moral dans les chaussettes, certains sympathisants en viennent à douter de la possibilité d'implanter, en Wallonie et à Bruxelles, une force à la droite du Mouvement réformateur (MR), l'officiel parti libéral en francophonie.
Au lendemain des élections du 26 mai, d'autres partisans de la droite dure sont remontés au front, avec la foi du charbonnier. Ils en sont convaincus, la prochaine fois sera la bonne. Une percée électorale sera au rendez-vous, à une condition : les trois mini-partis qui se sont présentés en mai – le Parti Populaire(PP), aujourd'hui dissout, les Listes Destexhe, rebaptisées « Libéraux-Démocrates » et « La Droite » - doivent se coaliser et cesser de s'entre-déchirer.
Dès ses premiers pas, le PP de Modrikamen s'est lepénisé, comme le révèle cet article. |
La défaite du « peuple de droite »
Début juin, La Droite, une des nombreuses dissidences du PP, a donné le ton, en diffusant un communiqué de presse résolument unitaire intitulé « De la nécessaire Union des Droites ». Son président-fondateur, Aldo Mungo, en appelle à « la construction d'une force politique crédible en réconciliant les droites ». Le constat est clair :« Ensemble, le PP, les Listes Destexhe et La Droite, auraient franchi la barre des 5% en Wallonie. La multiplication des petits partis ne mène qu'à l'éparpillement et à la défaite du peuple de droite ».
Ex-membre-fondateur du Parti populaire et ancien du Parti libéral, l'ancêtre du MR, Mungo plaide pour un mea culpa général. « Il faut tous nous remettre en question, revoir nos projets, notre stratégie et notre positionnement politique. Que chacun remise ses rancoeurs et son arrogance, afin d' édifier un grand parti libéral-conservateur qui manque dans l'offre politique ».
A la mi-juin, un congrès statutaire de La Droite enfonce le clou et souligne à « la nécessité de dépasser les divergences en vue de constituer un grand mouvement unifiant les différentes droites francophones ».
La Droite, une des dissidences du Parti populaire © Photo Tractothèque |
Carcaci est euphorique
Dans la foulée, l'ex-député fédéral PP, non réélu le 26 mai dernier, Aldo Carcaci, lance à son tour un appel à l'unité. Il multiplie les contacts avec des membres et ex-militants des petites formations de la droite non MR. Une réunion d'une cinquantaine de « délégués » a lieu le 9 juillet, à Grâce-Hollogne, dans les environs de Liège. Carcaci est euphorique. Dans un communiqué de presse, il vante « les énormes progrès réalisés en 40 jours pour unifier enfin la droite démocratique francophone et jeter les bases du nouveau parti ''Union des Droites''' ».
C'est reparti comme en 40 ? L'encre du communiqué d'Aldo Carcaci est à peine sèche que les « petites » droites renouent avec leurs vieux démons « guerriers ». Sur twitter, Claude Moniquet, ancien numéro deux des désormais feus Listes Destexhe, et désigné par Alain Destexhe – avant son exil de quelques mois en Amérique latine pour décompresser - président provisoire du nouveau parti des « Libéraux-Démocrates » (LD), assassine le communiqué de presse « mégalomaniaque » de Carcaci. Pour Moniquet, l'ex-député PP a été « l'un des plus inexistant parlementaire de tous les temps ». Selon le chef « libéral démocrate », les militants qui tentent d'organiser cette « union des droites », initiée par Carcaci, appartiennent à « une mouvance groupusculaire d'extrême droite. Ce sont des personnes avec lesquelles nous n'avons rien en commun, des populistes ».
Moniquet en tonton flingueur...flingué
Pour Claude Moniquet, ex-journaliste et ancien des services de renseignement extérieur français (*), cette lUnion des Droites est des plus « fumeuses ». Les Libéraux démocrates qu'il préside ont, déclare-t-il, de toutes autres valeurs. « Nous sommes ni plus, ni moins, un mouvement de droite classique et démocratique », précise-t-il. Rien à voir avec La Droite de Mungo ou avec les anciens « camarades » de l'ex-président du PP, Mischaël Modrikamen, traité de « facho » par Alain Destexhe lors d'un entretien commun avec le quotidien « La Dernière Heure », durant la récente campagne électorale. Dans une déclaration à l'agence Belga, Moniquet insiste, plus tonton flingueur que jamais : « Union des Droites est un vocable qui sert en réalité à désigner l'extrême droite. Or nous ne sommes pas d'extrême droite ».
Le show ne s'arrête pas là. Piqué au vif par les déclarations de Moniquet, Aldo Mungo accuse à son tour le président provisoire des LD de copiner avec l'extrême droite. « Moniquet doit cesser son double langage. Sa proximité journalière avec l'extrême droite belge contredit ses propos à la presse ».Et Mungo de pointer la personnalité trouble de Jérôme Munier, ex-PP et actuel bras droit de Moniquet – il est le Secrétaire général des Libérauxdémocrates – habitué des escapades en Suède, où il participe à des forums et séminaires aux côtés du Parti des Suédois démocrates, proche de Marine Le Pen et Matteo Salvini. Comme l'avait déjà auparavant révélé notre journal.
Par ailleurs, le président sans être élu des Libéraux démocrates doit faire face à une fronde interne. Celle-ci est conduite par la fraction radicale populiste musulmanophobe des ex-Listes Destexhe. Essentiellement implantée entre Liège et Verviers, cette opposition interne anti-Moniquet est conduite par les éléments infiltrés au coeur des LD par Valeurs citoyennes libérales (VLC), un micro-parti formé par un dissident du Parti populaire alors lié au Vlaams Belang.
Détestation entre petits chefs
La « droite de la droite » ne perd pas ses bonnes habitudes. Cela canarde joyeusement dans tous les sens. La détestation entre petits chefs est telle que la plupart d'entre eux sont incapables de s'asseoir autour d'une même table. Le discours d'adieu de Modrikamen, prononcé le 23 juin dernier devant un parterre de militants du PP, dans le jardin de son manoir boitsfortois,a été révélateur d'un étrange microcosme où tout le monde flingue tout le monde.
« Ne vous jetez pas dans la gueule du loup, a déclaré Modrikamen à ses ouailles, dont beaucoup sont à la recherche d'un autre parti susceptible de les accueillir après la disparition peu glorieuse du PP.« Il n'y a rien à attendre des Listes Destexhe (désormais « Libéraux démocrates »). Et je n'ai aucune confiance dans le groupuscule La Droite ».En d'autres termes : on ne change pas une formule qui perd, on se rentre dedans comme au bon vieux temps. Sur la base du même virus autodestructeur, l'extrême droite, malgré un temps de crise économique favorable à son courant idéologique, avait été incapable d'implanter au milieu des années 1990 une force nouvelle politique en Belgique francophone. L'Union des Droites est-elle elle également une chimère ?
CLAUDE DEMELENNE
RésistanceS | Observatoire belge de l'extrême droite
(*) « Journalisme et services secrets, compatibles ? », interview de Claude Moniquet par Manuel Abramowicz, publiée dans le mensuel belge « Même Pas Peur », n°4, novembre-décembre 2015, page 19
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