« Dimanche (très) noir » en Allemagne

[Journal RésistanceS.be – Dimanche 24 septembre 2017]


ÉLECTIONS LEGISLATIVES ALLEMANDES - Nos voisins germaniques voient l'entrée en masse de l'extrême droite dans son parlement national. C'est la fin de la « dénazification » qui avait permis d'empêcher la renaissance électorale des nationalistes xénophobes. Compressant un vieux parti nazi vers la marginalisation totale, une nouvelle droite radicale, anti-européenne, xénophobe, anti-musulmane et nationaliste-identitaire-libérale est née outre-Rhin - ÉTAT DE LA SITUATION ACTUELLE.

PAR MANUEL ABRAMOWICZ – JOURNAL RESISTANCES.BE

Le 24 novembre 1991, après la France, avec l'« effet Le Pen » en 1984, la Belgique connaissait son premier « dimanche noir » avec l'arrivée massive de députés du Vlaams Blok (VB) et d'un député du Front national Belge à la Chambre des représentants. Tour à tour, la Suède, la Hollande, l'Hongrie, la Pologne... connaitront aussi des « dimanches noirs ».
Après une possibilité de réorganisation et d'accession avortée dans le paysage parlementaire, à la fin des années 1980, avec le parti Die Republikaner (REP, Les Républicains), l'Allemagne est désormais frappée de plein fouet par la poussée anti-européenne, anti-musulmane, xénophobe et populiste.

Ce dimanche, la vague brune vient en effet de toucher nos voisins allemands. Le parti « Alternative für Deutschland » (AfD) vient de faire une percée considérable avec l'élection de plus de quatre-vingt députés fédéraux au Bundestag (13 %).

Fondée en 2013, l'Alternative pour l'Allemagne se caractérisait jusqu'à présent par un discours, certes radical sur l'immigration, mais libéral sur le plan économique. L'AfD était jusqu'il y a peu de temps encore considérée comme une nouvelle formation euroscepticiste, souverainiste, populiste, national-conservatrice de droite. Suite à des conflits internes, c'est son courant d'extrême droite qui arrivera à en prendre sa direction. Depuis, Alternative für Deutschland est à juste titre décrite comme une formation d'extrême droite pure et dure.



La fin du NPD nazi ?

Après la défaite du Troisième Reich nazi et la fin de la Deuxième Guerre mondiale, l'Allemagne avait été dénazifiée de fond en comble. Contrairement à d'autres Etats européens, ce pays a longtemps été épargné par l'émergence d'une extrême droite électorale. Au début des années 1970, ce fut le cas de la Grande-Bretagne avec le National front, au milieu des années 1980, la France connaitra la sortie fracassante de l'ombre d'un parti jusqu'alors groupusculaire, le Front national conduit par Jean-Marie Le Pen, et au début des années 1990, ce fut le tour de la Belgique avec la montée en puissance du Vlaams Blok (VB), l'appellation de 1978 à 2004 du Vlaams Belang (Intérêt flamand). La vague brune a aussi bousculé les échiquiers électoraux en Autriche, aux Pays-Bas, en Hongrie, en Pologne...

Outre-Rhin, l'extrême droite était, elle, restée jusqu'alors groupusculaire, divisée, folklorique et nullement représentée.
Depuis 1964, il existait bien un parti d'extrême droite très actif, le « Nationaldemokratische Partei Deutschlands » (NPD). Aux racines clairement nazies, le NPD n'a jamais réussi de réelle percée. A l'exception, lors des dernières européennes où il put y faire élire au Parlement européen Udo Voigt, un de ses anciens présidents, de 1996 à 2011. Avec le succès massif de ce dimanche de l'AfD, le Parti national-démocratique d'Allemagne va être de plus en plus compressé. Son espace d'existence plus réduit,eil n'aura plus d'espoir de pouvoir récupérer l'ensemble de l'électorat d'extrême droite classique, ainsi que celui de la droite populaire libérale devenu islamophobe qui émerge un peu partout en Europe..


L'extrême droite au pouvoir !

Pas d'alliance possible non plus entre le vieux NPD nazi et le nouveau parti AfD, caractérisé par son profil moderne, plus policé, plus professionnel... capable de séduire de plus larges franges de l'électorat allemand et d'arriver dans certaines de ses régions au pouvoir.

L'extrême droite germanique, ce dimanche, est de retour de façon réellement dangereuse pour l'équilibre de ce pays pilier central de l'Europe.

Manuel Abramowicz
Journal RésistanceS.be

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