Sarkozy chassera à nouveau sur les terres du FN

[Première publication de cet article : 9 août 2015 -  Republication : 21 août 2015


Ceci n'est pas une info exclusive mais une évidence : le perdant de 2012 voudrait retourner à l'Elysée. Nicolas Sarkozy est repassé à l'offensive dans les colonnes de Valeurs Actuelles. Un journal d'ultra-droite qu'a dirigé son ancien mentor idéologique, Patrick Buisson. But : piocher dans l’escarcelle électorale du Front national. Un remake des deux précédentes présidentielles.

Une « confession » de Nicolas Sarkozy a été publiée, sous la forme d'un « entretien exclusif », dans le numéro de cette semaine de Valeurs Actuelles, l'hebdomadaire de la droite nationale-libérale musclée et conservatrice d'outre-Quiévrain. Ce journal joue notamment le rôle de maillon entre l'électorat du parti LR (Les Républicains, anciennement UMP) de Sarkozy et celui du Front national (FN) de Marine Le Pen.
Dans cette interview, étiquetée donc comme « exclusive », l'ancien président de la République, de 2007 à 2012, affirme entre autres :

« Je ne ferai pas l’erreur de culpabiliser les électeurs du Front national. On doit lutter contre le FN en essayant de convaincre ceux qui veulent voter pour lui, en apportant des solutions à leurs angoisses, et non pas en les méprisant ou en leur donnant des leçons ».

Pour y parvenir, le mode opératoire ne peut être que de « parler lepéniste » à la manière sarkozyste. Dans cette discipline, « Iznogood » (l'un des diminutifs, certes peu flatteurs) de l'ex-locataire de l'Elysée, excelle.


Leçons de Buisson

La campagne présidentielle de 2017 est belle et bien lancée. Un pari simple à faire. Elle tournera autour de thématiques identiques de celles des deux précédentes élections : la sécurité, le terrorisme, l'immigration, l'islam, le chômage et l'identité nationale.

Il s'agit des vieilles recettes gagnantes en temps de crise. Soit le fonds de commerce de la droite pure et dure, qu'elle soit désormais lepéniste ou sarkozyste. Dans ce registre, « Sarko » se rappellera certainement des leçons particulières prodiguées par son mentor idéologique de l'époque, Patrick Buisson (en photo ci-contre à la Une du quotidien Libération du 6 mars 2014).

Militant, puis intellectuel d'extrême droite, ce dernier a été le « compagnon de route » de quelques personnalités de renom ayant animé la « scène nationaliste » française dans les années 1970-1980. Comme par exemple, Pascal Gauchon qui fut secrétaire général du Parti des forces nouvelles (PFN), dont les principaux leaders furent auparavant à la base de la création du FN, et fut l'un des rédacteurs en chef de Défense de l'Occident, la revue fondée par l'autoproclamé « écrivain fasciste » Maurice Bardèche (parent et collègue politique de l'écrivain collaborationniste Robert Brasillach). Toujours fidèle à un nouvel ordre pour remplacer la République fondée sur les principes des droits de l'Homme (et Mai 68), Patrick Buisson fut aussi le directeur de plusieurs journaux d'ultra droite : Minute et Le Crapouillot, mais encore... Valeurs Actuelles, qui cette semaine offre à Nicolas Sarkozy un nouveau tremplin médiatique vers les électeurs du FN. Une mouvance doctrinale des plus homogènes, comme vous l'aurez constaté par vous même.

La stratégie de Buisson (et de bien d'autres) : oeuvrer au rapprochement de toutes les composantes de la droite française, à l'exception de son courant gaulliste qu'incarna Jacques Chirac. Rien d'étonnant puisque cet idéologue de la Sarkozie fut un partisan acharné de l'Algérie française et de son pseudopode terroriste, l'OAS (Organisation de l'armée secrète). Patrick Buisson tient certainement toujours Charles de Gaule pour un traitre à la France (coloniale).


Tête haute et mains propres

Seulement maintenant, celui qui perdit royalement contre François Hollande en 2012, ne pourra plus recevoir les conseils de son Buisson. L'individu s'est chamaillé avec l'ex-président à propos d'une sombre affaire de conversations privées qu'il avait à son insu enregistré.

L'homme de l'ombre, véritable petit prince Machiavel de Sarkozy durant les années élyséennes, doit également faire face à une série de tracas judiciaires. Le mois dernier, il a été mis en examen, soit inculpé, par un juge d'instruction enquêtant sur des abus de biens sociaux et de détournement de fonds publics dans ladite « affaire des sondages de l'Elysée ». Des enquêtes d'opinion, réalisées entre 2007 et 2012 sous la présidence de Nicolas Sarkozy, qui auraient profité illégalement sur le plan financier à Buisson, dans un premier temps en tous les cas. L'ex-conseiller pourrait n'être que l'un des fusibles - qui vient de sauter - d'un système plus vaste.

Selon une des règles fondamentales en politique, il faut, tout le moins en apparence, toujours avancer la tête haute et avoir les mains propres. Patrick Buisson a donc été définitivement mis dans les oubliettes de l'histoire de la galaxie sarkozyste (comme d'autres d'ailleurs). En 2017, Sarko agira cette fois-ci seul - ou avec d'autres transfuges d'extrême droite - pour tenter de reprendre les rênes de la France. S'arc-boutant une nouvelle fois sur l'électorat de la famille lepéniste.

MANUEL ABRAMOWICZ





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© Dessin Riss / Charlie Hebdo


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© Article du journal en ligne  RésistanceS | Lundi 10 août 2015 | RésistanceS.be est aussi sur FACEBOOK  ICI