RésistanceS | Observatoire belge de l'extrême droite | 9 août
2015
Les
gros-bras de Nation voulaient aller aujourd'hui à Tournai ?
Expert
en provocation, le mouvement « national-solidariste »
profite d'un fait d'actualité dans le but de se faire médiatiser.
Une fois de plus, un vieux fonds de commerce d'extrême droite est
mis en avant : la lutte contre les demandeurs d'asile dans notre
pays.
C'est
en tentant de profiter des remous populistes contre l'installation
d'un centre pour demandeurs d'asile, dans la ville de Tournai, autour
d'un rassemblement aujourd'hui annulé, que le mouvement d'extrême
droite francophone Nation, agissant encore une fois comme une
véritable milice privée, refait parler de lui.
Le
président, certes fantoche, de ce mouvement groupusculaire, un
certain Jean-Pierre Demol, s'est vu refuser toute collaboration par
l'organisatrice même de cette manifestation contre ce centre. La
tête officielle de Nation s’en est offusqué, sur Facebook,
prétendant vouloir apporter son « aide participative à
cette manifestation »,
présentée « comme citoyenne,
et non politique ».
Jean-Pierre Demol et ses nervis n’ont jamais fait pourtant autre
chose que de tenter de noyauter des initiatives citoyennes pour
diffuser leur propagande xénophobe et poujadiste.
Demol
ment !
Il
s'est ensuite offusqué de ce qu’on lui prête l’intention de
créer des troubles lors de la manifestation. « JAMAIS,
il ne s'est passé "du bordel" »
(NDLR : lors de la présence de Nation
à des manifestations publiques), a-t-il assez vite répondu. Pour
défendre sa cause, Demol à énuméré par la suite une série
d’actions de son mouvement. Voilà qui devrait faire sourire nos
habituels lecteurs (dont des activistes et des dirigeants de Nation
en personne) : pour rappel, ci-dessous voici une liste des incidents
les plus violents
relayés dans la presse qui ne concernent que des manifestations où
le mouvement Nation était présent officiellement.
- Malone, septembre 2012: témoignage à charge dénonçant de la stratégie de Nation CLIQUEZ ICI
- Bruxelles, avril 2014 : tabassage d'un vieux manifestant, à terre, roué de coup à l'aide d'une chaise CLIQUEZ ICI et aussi LA
- Bruxelles, mai 2015 : des militants de Nation assurent le service d'ordre d'un élu Front National, Laurent Ozon, pour venir jouer les gros bras au sein même d'une manifestation de sans-papiers CLIQUEZ ICI
- Bruxelles, juin 2015: tabassage d'un SDF par 6 militants (dont plusieurs possèdent un casier judiciaire) CLIQUEZ ICI
La
violence de ce mouvement « nationaliste, solidariste et
identitaire » et la dangerosité qui en découle n'est plus à
démontrer depuis longtemps. Le procès qui devrait se tenir en
septembre pourrait amener la Justice à dissoudre le mouvement en
tant que milice privée.
Bourgmestre
PS
A
Tournai, comme ailleurs, c'est donc bien l'extrême droite qui est
une source d'insécurité et non des demandeurs d'asiles qui fuient
des pays en guerre pour éviter d'être massacrés ou embrigadés.
Le
bourgmestre de la ville, Paul-Olivier Delannois (PS), en affirmant
que « cette forte concentration risque de créer un
sentiment d'insécurité », a bel et bien déroulé le
tapis rouge pour l'extrême droite. Le rôle d'un homme politique
n’est sans doute pas de diffuser des messages inutilement
anxiogènes.
Justifier
une position politique par le « sentiment d’insécurité »
(sic) est intellectuellement peu courageux : de deux choses
l’une, soit pour le Parti socialiste, les demandeurs d’asile sont
une source d’insécurité pour les tournaisiens et, dans ce cas,
les démocrates doivent prendre acte du basculement idéologique dans
le racisme. Soit ceux qui fuient leur pays ne sont pas une source de
criminalité et, dans ce cas, il convient à un parti progressiste de
démontrer que ledit « sentiment d’insécurité »
éventuellement généré par un accueil important n’est pas fondé
plutôt que d’utiliser une perception erronée pour justifier une
opposition à cet accueil.
Alors
que les antiracistes s’attendaient au minimum à un léger un
recadrage par le bourgmestre en titre, Rudy Demotte,
ministre-président de la Fédération Wallonie-Bruxelles, ce dernier
n’a aucunement désavoué son subalterne préférant toutefois ne
pas reprendre les propos malheureux pour plutôt mettre en avant la
nécessité d’un « accueil de qualité pour les réfugiés
en détresse» dans une «logique de partage ».
Il est
évident que l’accueil d’un petit nombre de candidats réfugiés
facilite l’intégration de ceux-ci au sein dans une commune et
permet de créer plus facilement des solidarités avec la population.
Il est tout aussi évident que c’est bien cela que souhaite éviter
la NV-A en créant la tension actuelle par le regroupement.
Néanmoins, ne pas regretter publiquement les propos d’un élu
revient à les valider. La position de M. Demotte quant à
«l’insécurité» n’est pas communiquée: par solidarité envers
son Bourgmestre, par calcul électoral ? Nul ne le sait.
Malaise
chez les organisateurs
Quant
à la mobilisation « citoyenne », on notera que la
personne responsable du mur Facebook faisant la promotion de la
manifestation anti-accueil a finalement préféré s'abstenir de
prendre la responsabilité d'être considéré comme l'organisateur
d'une manifestation qui ne pouvait que dégénérer au vu de la
participation de Nation.
Il
faut également mentionner que le groupe qui s’intitulait
initialement « Contre le centre d'asile caserne Saint-Jean
Tournai », créé ce vendredi, s’appelle depuis aujourd'hui
après-midi « Contre ce nombre élevé de demandeur d'asile
caserne Saint-Jean Tournai ». On imagine sans peine que face au
déferlement de propos racistes, les initiateurs se sont sentis
obligés de « préciser » qu’ils n’étaient pas
contre l’accueil… tout en maintenant une présentation de leurs
objectifs toujours vague : « Si
comme moi vous pensez que cela n'est pas une bonne idée de recevoir
790 demendeur
(sic)
d'asile Dans notre belle ville Tournai venez le dire ici partager. »
et en gardant comme photo de profil une photo qui s’oppose au
centre d’accueil.
Que
les demandeurs d’asile accueillis soient 10 ou 700, il est
inacceptable de lier sémantiquement « immigration » et
« insécurité ». Faire cela, c’est reprendre à son
compte la désinformation diffusée par l’extrême droite. Sans
nier les difficultés inhérentes à ce projet, on pouvait attendre
d’un parti qui a dans son ADN un idéal de fraternité et de
solidarité qu’il mette en avant à la fois la fierté d’offrir
la protection à des familles qui fuient les horreurs de la guerre
mais aussi les emplois qui seront générés par le centre. Mais
cela, personne ne semble s’en préoccuper, Tournai étant devenue
sans doute très récemment une ville de plein-emploi.
© RésistanceS | Observatoire belge de l'extrême droite | Dimanche 9 août 2015