L'extrême droite turque bruxelloise passe au MR

RésistanceS | Observatoire belge de l’extrême droite  | Vendredi 27 octobre 2023 | 08 h 01

 

Congrès du MR du 22 octobre 2023, Safa Akyol, ex-PS, avec d'autres nationalistes turcs.


COMMUNAUTARISME ÉLECTORALE | Depuis le début des années 2000, le PS, ECOLO et le CDH (Les Engagés) se sont spécialisés à Bruxelles dans le vote communautariste. Le MR s’est jusqu’à présent limité à la séduction d’électeurs afro-descendants. Le parti libéral de droite vient de passer ce cap. Désormais, il pourra compter sur un agent d’influence pour toucher les belgo-turcs de la capitale. Ex-PS et toujours bras-droit du bourgmestre de Saint-Josse, Émir Kir (exclu du PS en 2020), Safa Akyol est aussi connu pour son appartenance au lobby turc. National-conservateur, nationaliste panturc, islamiste, raciste contre les kurdes, les autres minorités ethniques et religieuses des territoires occupés par l’armée turque et négationniste du génocide arménien  | INFOS DE RÉSISTANCES.


Membre jusqu'il y a peu de la direction des jeunes du Parti socialiste belge francophone (PS) et bras-droit du bourgmestre-député Émir Kir (exclu du PS au début de l’année 2020, pour ses liens avec l'extrême droite turque, notamment révélés par RésistanceS), Safa Akyol semble être désormais passé au MR, le parti libéral francophone. Il ne s’agit pas d’un petit inconnu pour le webjournal de l’Observatoire belge de l’extrême droite qui a longtemps enquêté sur lui. RésistanceS a ainsi pu révéler, dans plusieurs articles successifs, son appartenance idéologique au milieu turc nationaliste islamiste.

 

LOBBY NATIONALISTE TURC

Le même individu effectivement agit, sous couverture « démocratique » depuis plusieurs années, comme un agent d'infiltration au service du lobby national-conservateur islamiste turc en général, de sa fraction nationaliste panturquiste et racialiste en particulier. Il y était alors très actif.

Au point d’en devenir un cadre-dirigeant. Il va alors siéger au conseil d’administration de la section belge de l’Avrupali Türk demokratlar Birgliği (UETD) et être ensuite nommé, chef de son mouvement de jeunesse. Cette UETD est le réseau européen de l’AK-P, le parti politique national-conservateur islamiste, conduit d’une main de fer par Recep Tayyip Erdoğan, le président de la République de Turquie. En mai 2015, Safa Akyol trône à la tribune d’un meeting contre le monument du « soi-disant génocide arménien » (sic).


Désormais passé au MR, Safa Akyol pourrait être le cheval de Troie ou l'intermédiaire pour éventuellement préparer l'arrivée du bourgmestre belgo-turc de Saint-Josse, lui aussi lié à ce lobby politico-religieux turc, auprès de Georges-Louis Bouchez.

 

Safa Akyol, le 23 mai 2015, à la tribune d’un meeting nationaliste turc pour s’opposer à un monument dédier à la mémoire des victimes du génocide arménien, commis par l’empire turc © Image RTL-TVi


 

MISSION : PASSER DEVANT LE PS

Objectif du président du parti libéral de droite belge francophone, omnipotent et machiavélique : prendre des voix d'électeurs turcs historiquement PS, depuis l'« effet Émir Kir », enclenché au début des années 2000, d'abord à Saint-Josse, puis par contagion opportuniste à Schaerbeek, dans le quartier « la Petite Istanbul », et à Bruxelles ville.


But final du MR : faire la différence aux élections régionales, fédérales de juin 2024 et communales d’octobre 2024, en passant en tête de peloton, dans la course pour s’accaparer la Région de Bruxelles-Capitale, les communes de Saint-Josse et de Schaerbeek. En laissant le PS bien derrière le maillot jaune qui sera alors endossé par son rival de toujours, le MR.

Le passage du PS au MR du belgo-turc Safa Akyol n'est pas le premier et ne sera pas le dernier.  D'autres militants nationalistes islamistes devraient le rejoindre chez Bouchez.


COURANT D'EXTRÊME DROITE AU MR ?

Ce passage en force pourrait renforcer au Mouvement réformateur son courant « national-libéral », nom utiliser, dans les années 1980, par les libéraux présents au Front national français de Jean-Marie Le Pen.

Le courant interne d'ultra droite au MR y est déjà actif depuis plusieurs années. Constitué d’anciens du CEPIC, l’aile droitiste du Parti social-chrétien (PSC) de l’époque, de vieux partisans de Roger Nols, le bourgmestre raciste de Schaerbeek dans les années 1970-1980 (d'abord affilié au Front démocratique francophone, le FDF, puis « compagnon de route » du Parti réformateur libéral, le PRL, avant de terminer au Front nouveau de Belgique, un FN-bis fondé en 1996), ce courant national-libéral populiste a été renforcé, par l'adhésion au parti des Bleus, d'ex-électeurs, sympathisants, militants et même d'un des anciens secrétaires nationaux du parti d'extrême droite Front national.

La stratégie de Bouchez pour capter, du moins à Bruxelles, l'électorat orphelin du FN belge se poursuit donc. De manière méthodique et de façon patiente. Étape par étape. En feuilletonnant son développement opérationnel.


Aux élections de juin et octobre 2024, effectivement, l'extrême droite francophone devrait être absente dans la capitale, faute de militants capables de constituer des listes électorales avec suffisamment de candidats et de les déposer. Mais aussi suite aux sabotages internes orchestrés, depuis 2007, contre les « fachos francophones » par le Vlaams Belang, via Marine Le Pen, pour être l'unique récepteur des voix bruxelloises d'extrême droite.

 

Pour séduire cet électoral xénophobe, raciste, poujadiste et nationaliste, il faut parler sa « langue ». En la matière Georges-Louis Bouchez est devenu un expert.

 

Émir Kir, député-bourgmestre de Saint-Josse et Safa Akyol, en juillet 2018, entourant un de leur ami turc, le maire d’Emirdağ et membre-dirigeant du Parti d’action nationaliste (MHP), le Vlaams Belang local © Archives RésistanceS – RIDAF.



GEERTS, TEITELBAUM, KOTEK...

La présence désormais confirmée au MR de nationalistes communautaristes et politico-religieux islamistes va-t-elle susciter des réactions de celles et ceux qui dénoncent, depuis tant d'années, l'électoralisme communautariste d’Ecolo et du PS, dénoncés carrément comme des foyers d’« islamo-gauchistes » ?


Ils sont attendues avec patience, les cris d'effroi des Nadia Geerts, ex-cheffe de section locale d’Ecolo, maitresse de conférence en indisponibilité, toujours actuelle conseillère du Centre Jean Gol du MR et sœur laïque d’une loge bruxelloise, de Viviane Teitelbaum, députée bruxelloise du MR et membre d’une mouvance sioniste liée à la Ligue belge contre l’antisémitisme (antisionisme en fait) de Joël Rubinfeld, cofondateur en 2009 du Parti populaire (PP) de l’avocat d’affaires carolo-bruxellois Mischaël Modrikamen et proche d’un ancien ministre israélien d’extrême droite, de Joël Kotek, collaborateur MR au Parlement bruxellois et directeur de la revue sioniste Regards ou encore de leur « compagnon de route » de jadis, Claude Demelenne, auteur d'un pamphlet antimusulmans signé avec Alain Desthexe, alors parlementaire libéral depuis les années 1990 et meneur de son courant national-libéral, aujourd'hui passé, par « zemmourisation » , à « Chez Nous », un nouveau parti d'extrême droite francophone.


LE HAMAS N'EST PAS TERRORISTE

Pour en revenir à Safa Akyol et terminer avec ce douteux individu, celui-ci est connu pour le culte à la personnalité qu'il voue à Recep Tayyip Erdoğan depuis bien longtemps. Akyol a été membre – et le serait toujours selon des sources internes - de l'AK-P, la formation politique du président national-conservateur islamiste turc.

 

Le chef suprême de la Turquie vient de déclarer que le « Mouvement de la résistance islamique » (Hamas) palestinien ne pouvait pas être désigné comme une organisation terroriste et que ses membres étaient, en résumé, de véritables combattants honorables. Déclaration provocatrice faite après les attaques militaires contre des postes de l’armée israélienne et des massacres massifs de civils juifs, israéliens et étrangers, le 7 octobre dernier dans l’ouest d'Israël, commis par la branche militaire du Hamas. Ce dernier a été fondé, au milieu des années 1980, par la confrérie des Frères musulmans. Recep Tayyip Erdoğan est lui issu de sa branche turque.


Ce qui désormais devrait encore plus accentuer la « panique morale » dont sont atteints les Teitelbaum, Kotek et autres Geerts, connus pour leur soutien indéfectible à l'État israélien et leur combat vigoureux contre le communautarisme islamique. Vont-ils avoir dès lors le courage cette fois-ci de dénoncer la présence, dans leurs rangs, de cette fraction turque communautariste politico-religieux, islamo-nationaliste et anti-israélienne, conduite par Safa Akyol ? Vont-ils adopter - et adapter - à leur tour, l’adage de l’ex-ministre française des républicains de gauche, Jean-Pierre Chevènement : « un ministre, ça démissionne ou ça ferme sa gueule ».

 

Comme lors de l’alliance post-électorale de 2014 à 2018 avec la N-VA de Bart De Wever, encadrée par son courant internet d’extrême droite nationaliste flamand nostalgique du parti antisémite VNV (revoir le dossier du n°1 du Journal de RésistanceS de mai 2019), il est fort à parier qu’il et elles mettrons, une nouvelle fois, leur tête dans le sable, comme le font les autruches lorsqu’elles sont prises de panique.



MANUEL ABRAMOWICZ
RésistanceS
| Observatoire belge de l’extrême droite




POUR ALLER PLUS LOIN

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RésistanceS du 23janvier 2020
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-     « Le parti d'extrême droite MHP est un des piliers de l'État turc » pour le politologue Ahmet Insel dans un entretien exclusif avec le journal RésistanceS
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RésistanceS du 18  novembre 2021
www.resistances-infos.blogspot.com/2021/11/ex-leader-du-courant-liberalo-lepeniste.html

 

-     Le passé raciste du parti libéral francophone (dans le texte)
RésistanceS du 23 mai 2001
www.resistances-infos.blogspot.com/2001/05/le-passe-raciste-du-parti-liberal.html



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