Extrême droite francophone, nouveau conflit

RésistanceS | Observatoire belge de l’extrême droite  | Mercredi 8 juin 2022 | 19 h 14

 

Geoffrey Botton, président-fondateur de L’Éveil, et Grégory Bourguignon, dirigeant-fondateur du collectif En Colère, en avril dernier à Bruxelles lors d’une manifestation catholique contre l’IVG. Depuis, ils se sont séparés © Photo Facebook



 

IMPLOSION | Officiellement en fusion depuis le début du mois de mai dernier, En Colère et L’Éveil viennent déjà de rompre leur « partenariat ». Occasion d’un retour sur l’existence de ces deux groupuscules nationalistes-identitaires wallons fondés par des dissidents du Mouvement Nation. La singularité de la droite extrême francophone reste ses conflits internes.

 

Quand certains réussissent à s’unir, au sein du micro-parti d’extrême droite libérale Chez Nous (ce sont les cas de l’ex-Parti national européen/PNE, de l’association Valeurs nationales et du mouvement identitaire royaliste Égide, ex-Génération identitaire Belgique), d’autres n’y arrivent pas. Comme le prouve la rupture du partenariat, scellé à la mi-mai, entre le collectif En Colère et le parti groupusculaire L’Éveil.

 

 

En Colère

Ce collectif est issu de « Mouscron en Colère », fondé en 2019 par un « vieux » militant d’extrême droite, Grégory Bourguignon, alors toujours membre de la direction du Mouvement Nation. Il est issu de l’un des comités pour la fermeture des centres pour réfugiés (CFCR). Après l’implosion de Nation en septembre 2019, Bourguignon rejoint sa dissidence qui va former en janvier 2020 le Parti national européen (PNE). Mais, il en sera vite exclu. « Mouscron en Colère » avait déjà élargi sa zone géographique en s’implantant ailleurs en Wallonie, en été 2020, sous le nom de collectif « En Colère ». Avec une spécialisation : la dénonciation des mesures des autorités politiques contre la pandémie de la Covid-19 en Belgique. Avec une propagande conspirationniste à tous les étages. Autres dirigeants d’En Colère : Nadine Crovatto, mieux connue dans le milieu néopaïen-nazi sous le pseudonyme « Luna Stenfors », et Lucien Coppens, un jeune intégriste national-catholique actif également au sein de Civitas-Belgique, l’un des organisateurs des manifestations « pour la Liberté » et surtout contre les mesures anti-covid. Civitas ne cesse alors de dénoncer le « complot mondialiste » contre l’Europe. Tous les dirigeants d’En Colère ont été aux élections candidats pour le compte du Mouvement Nation.



Éveil 

Les fondateurs de ce parti groupusculaire, apparu sur Facebook le 5 octobre dernier, sont également des ex-militants et anciens responsables de Nation. Implanté dans la région namuroise, sur un style très simpliste, sur son site Internet amateur, L’Éveil se présente avec beaucoup de sérieux comme étant «  un parti d'un nouveau genre » qui affirme être « ni de droite, ni de gauche, ni même du centre ». « Nous voulons rendre au peuple sa liberté, en modifiant le régime en place ! Éveillons-nous ensemble pour bâtir notre futur ! », lance L’Éveil sur son groupe Facebook. Malgré ses déclarations grandiloquentes et ses présences parmi les organisateurs des « marche pour la liberté » en automne et hiver dernier, le nouveau venu sur la scène de l’extrême droite francophone reste à l’état groupusculaire. Après plusieurs participations communes, à des manifestations, notamment celle organisée le 24 avril dernier à Bruxelles par le milieu catholique conservateur belge contre l’IVG, le collectif En Colère annonce le 3 mai suivant sa fusion au sein de L’Éveil. Grégory Bourguignon prévient même ses quelques membres qu’il n’existera plus sous cette appellation et agira alors totalement sous l’étiquette du parti L’Éveil.


Grégory Bourguignon (au centre), Nadine Crovatto (à l’extrême droite) et le jeune national-catholique Lucien Coppens, après la première réunion de la direction du collectif En Colère, à Namur en octobre 2020 © Photo Réseau social


 

 

Crise interne entre En Colère et le chef de L’Éveil

La fusion entre ses deux minuscules groupes nationalistes-identitaires wallons n’a pu tenir moins d’un mois. Il y a deux jours, le dirigeant-fondateur du collectif En Colère a en effet communiqué auprès de sa petite poignée d’activistes de l’existence d’un conflit profond avec le chef de L’Éveil, Geoffrey Botton. Grégory Bourguignon affirme par exemple que ce dernier le « dirige sans partage » et exclu tout affilié qui aurait « une idée divergente aux siennes ». Récemment cela a été le cas de « Luna Stenfort », cofondatrice d’En Colère et « une amie depuis plusieurs années » de Bourguignon. Dans le cadre de cette purge interne, des « accusations fausses, diffamatoires et homophobes » auraient été tenues par le président-fondateur de L’Éveil contre les deux chefs d’En Colère.

Conclusion de Grégory Bourguignon : « Nous décidons donc de mettre fin à notre collaboration avec ce groupe malsain et sans fondements, sans contenus, et qui rassemble tout et son contraire à la fois. En Colère continuera de mener des actions pour défendre nos droits et libertés ainsi que pour défendre notre souveraineté et notre identité. » Cette crise interne démontre surtout, une fois encore, la singularité de l’extrême droite de chez nous : son incapacité à s’unir sur le long terme.

 

SIMON HARYS

RésistanceS | Observatoire belge de l’extrême droite



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