Qu'est réellement le MHP, le Parti d'action nationaliste turc ?

RésistanceS Observatoire belge de l’extrême droite Dimanche 12 janvier 2020, 22h 55


Salut de reconnaissance de l'extrême droite turque lors d'un meeting du Milliyetçi Hareket Partisi (MHP), en décembre 2019 © DR




RADIOSCOPIE – En Turquie, une formation politique, le MHP, représente l'extrême droite locale depuis sa création, sous ce nom, en 1969. Il est également présent en Europe au sein de la diaspora turque. Des liens existent entre le MHP et des élus de partis démocratiques belges, comme la récente « affaire Emir Kir », le bourgmestre PS de la commune bruxelloise de Saint-Josse, en est un exemple. Le Journal de RésistanceS vous propose un résumé de l'histoire et de la force actuelle de ce parti nationaliste, ainsi que sur ses liens avec le pouvoir turc et sa diaspora.

Le Milliyetçi Hareket Partisi (MHP, en français : Parti d’action nationaliste) apparaît sous ce nom dans le paysage politique en Turquie en 1969. Il est directement issu du Cumhuriyetçi Köylü Millet Partisi (CKMP, Parti nationaliste républicain des campagnes), dont un courant interne ultra nationaliste avait pris la présidence. Ce courant est conduit par Alparslan Türkeş (1917-1997), un des conspirateurs d'un coup d’État militaire qui eut lieu en 1960. Alias « Basburg » (Le Meneur), Alparslan Türkeş va présider d'une main de fer le MHP et y défendre inconditionnellement une ligne doctrinale se basant sur l'idéologie panturquiste et touraniste, théorisée par l'écrivain et idéologue nationaliste Nihâl Atsiz (1905-1975). Formation électorale, le MHP fait élire, dès sa première année d'existence, son premier député national avec un peu plus de 3 %. Trente ans plus tard, il devient le deuxième parti le plus important du pays avec près de 18 %. Fort de 129 députés sur 550 députés, le Milliyetçi Hareket Partisi va ensuite subir une très importante défaite aux élections de 2002. Il disparaît du Parlement. Mais cinq ans plus tard, après avoir obtenu 14 % des voix, il y revient avec 71 députés. Membre de l'opposition durant plus de dix années, le MHP va ensuite, après un reflux significatif aux législatives de 2018, apporter son soutien, mais sans y participer, au gouvernement de l'Adalet ve Kalkınma Partisi (AKP, Parti de la justice et du développement), la formation national-conservatrice islamique de Recep Tayyip Erdoğan, dans le cadre d'un cartel électoral portant le nom de Cumhur Ittifaki (Alliance populaire), rejoint également par le Büyük Birlik Partisi (BBP, Parti de la grande unité), fondé en 1992 par des dissidents du MHP. 


Alparslan Türkeş (1917-1997),
alias « Basburg » (« Le Chef ») du MHP.
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Actuellement, le Parti d'action nationaliste est toujours bien représenté au niveau politique, avec 49 députés au Parlement national et 167 maires de communes et petites villes, dont celle d'Emirdag (36 447 habitants) d'où sont originaires une majorité des Turcs de Saint-Josse. Depuis 2015, le bourgmestre de cette commune bruxelloise, Emir Kir (PS), rend en juillet une visite de courtoisie à Uğur Serdar Kargin, le maire MHP d'Emirdağ. En 2019, celui fut remplacé par le candidat de l'AKP.

Se revendiquant d'une « Grande Turquie », au-delà des actuelles frontières du pays, le MHP va, dès sa création, s'implanter dans des communautés turcophones présentes à l'étranger. Tout d'abord, dans des républiques soviétiques de l'époque (avec la complicité de l'Union des solidaristes russes, une organisation anticommuniste internationale liée à la CIA), puis également dans l'immigration turque présente en Europe de l'ouest. Cette implantation se fait notamment par l'organisation paramilitaire Bozkurtlar (Loups gris), apparue au sein du MHP, dès 1969, comme organisation de jeunesse, sous le nom de l'Ülkü Ocakları Eğitim ve Kültür Vakfı (Association culturelle et éducative des Foyers idéalistes). En 2020, le MHP, via des noms écrans de « fédérations », reste implanté en Europe au sein de l'immigration turque, dont des membres, ayant la double nationalité, ont été notamment élus conseillers communaux en Belgique, sur des listes de partis démocratiques, comme Le Journal de RésistanceS, avec d'autres médias, l'a régulièrement révélé depuis plus de quinze ans. 

MANUEL ABRAMOWICZ
du Journal de RésistanceS



Meeting du parti d'extrême droite MHP en novembre 2018, avec Uğur Serdar Kargin, le maire d'Emirdağ d'où provient beaucoup de familles turques installées en Belgique © DR.




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© RésistanceS | Bruxelles | 12 janvier 2020